Au cœur de cette année riche en événements sportifs, le MPCC fait un nouveau point sur les Chiffres de la Crédibilité. Avec 11 cas révélés au cours des six premiers mois, le cyclisme est loin d’être le sport le plus touché par le dopage mais des événements récents incitent à la plus grande vigilance.
Depuis dix-sept ans, le Mouvement pour un cyclisme crédible n’a cessé d’être à l’avant-garde de la lutte contre le dopage. En lançant dès 2008 des tests de cortisolémie au sein du peloton, en demandant le bannissement du Tramadol apparu au mitan des années 2010 (interdiction effective depuis le 1er janvier 2024 par l’AMA), en imposant à ses équipes membres de ne pas engager de coureur suspendu plus d’un an dans les deux années qui ont suivi sa suspension, le MPCC s’est voulu acteur de la lutte.
Et à quelques jours des Jeux de la XXXIIIe olympiade, le MPCC se réjouit de voir de nombreuses institutions se préparer à défendre haut et fort la crédibilité du sport de haut niveau. L’International Testing Agency (ITA) sera chargée d’analyser 6000 échantillons au cours des deux semaines de compétition (2000 pour les Jeux paralympiques). A titre de comparaison, environ 6200 échantillons avaient été prélevés lors des Jeux de Tokyo en 2021, moins de 3000 à Londres en 2012. Née en 2018, cette agence internationale avait pour but de renforcer la crédibilité de la lutte contre le dopage, en évitant notamment les soupçons de conflit d’intérêt entre organes de contrôle nationaux et athlètes, nés du scandale du rapport McLaren établissant un dopage d’Etat en Russie.
Le deuxième trimestre 2024 qui vient de se conclure a malheureusement conforté le MPCC dans son discours de vigilance constante face à ce fléau. Le 20 avril dernier, le New York Times et la chaine de télévision allemande ARD publiaient une enquête conjointe sur la dissimulation de 28 contrôles positifs (pour 23 athlètes) à la trimétazidine, lors d’un meeting de natation en Chine, en janvier 2021. Le scandale a rapidement pris de l’ampleur car certains des nageurs incriminés auraient ensuite participé et même remporté des médailles d’or aux JO de Tokyo. De plus, l’Agence mondiale antidopage (AMA) a été pointée du doigt dans la gestion de cette affaire, entre retours d’information tardifs et procédures juridiques à respecter.
LA QUESTION DES MOYENS DE LA LUTTE
Dans le même temps, un autre pays alimente la chronique de l’antidopage : le Kenya. La multiplication du nombre de contrôles positifs (une soixantaine depuis le début de l’année) inquiète certains observateurs mais doit être mise en perspective avec les efforts sans précédent fournis par le gouvernement local pour « nettoyer les écuries » et améliorer l’image du pays dans les compétitions internationales. Ainsi, 25 millions de dollars ont été dépensés par l’ADAK (Agence antidopage du Kenya) au cours des cinq dernières années. Néanmoins, ces efforts pourraient être réduits à néant par le Trésor public local, qui a prévu une réduction drastique du financement des agences semi-indépendantes, dont l’ADAK, à hauteur de 30%.
Troisième pays le plus touché, selon nos chiffres, en 2024, le Kenya est un symbole de la lutte antidopage. Un combat qui demande un engagement fort des acteurs du sport, de la sphère politique mais aussi un investissement financier non négligeable. En France (22 cas recensés cette année), l’AFLD a notamment publié son rapport d’activité 2023 pour les chiffres du dopage 2022. Sur 12000 échantillons prélevés, 105 ont révélé des résultats anormaux et 70 dossiers ont donné lieu à des sanctions. Le cyclisme, deuxième sport le plus contrôlé de France derrière le rugby, cumulait 1632 prélèvements pour 0,86% de résultats anormaux.
LE SPECTRE DU TAPENTADOL
Dans le monde et pour les six premiers mois de l’année 2024, nous recensons finalement 11 cas de fraude sportive dans le cyclisme professionnel dont 9 de dopage. Le cas le plus récent ayant fait l’actualité a été celui d’Andrea Piccolo, coureur d’EF Education-EasyPost. Au mois de mars, la formation américaine, membre du MPCC, avait immédiatement suspendu l’Italian après avoir découvert l’usage d’un somnifère non-autorisé par le staff médical. Pire, Andrea Piccolo a été arrêté le 21 juin dernier par les douanes italiennes pour avoir transporté des hormones de croissance. EF Education-EasyPost a ainsi strictement appliqué l’une de nos règles : retirer un coureur de ses rangs dès son implication dans une affaire de dopage.
Si le cyclisme, contrairement aux idées reçues, ne figure pas en haut de la liste des sports les plus touchés, ce dernier cas souligne à quel point la lutte contre le dopage reste un combat de tous les instants. Le 12 juin dernier, le MPCC a envoyé une lettre à l’AMA pour faire part de l’émergence dans le peloton d’une nouvelle médication, le Tapentadol. Bien plus puissant que le Tramadol, cet opioïde a des effets analgésiques proches de la morphine et permet donc de repousser les seuils de la douleur.
Plus que jamais, nous demandons donc aux équipes qui songent à la santé de leurs coureurs et coureuses, à l’équité de la compétition, de rejoindre le MPCC. Managers, directeurs sportifs, personnels encadrants doivent être « acteurs de la lutte antidopage » pour consolider les acquis d’un passé proche, rester vigilant au présent et ne pas compromettre l’avenir de notre sport. Comme nous l’avons déjà signalé lors de notre documentaire produit en début de saison, illustrant les actions de l’ITA et de nos membres (équipes et coureurs), il reste nécessaire de « garder la lumière allumée ».