En complément de son relevé trimestriel, les Chiffres de la Crédibilité, le MPCC va désormais établir un tableau à date des cyclistes professionnel(le)s sanctionné(e)s. Au-delà de la photographie instantanée de l’état des lieux, l’objectif sur la durée sera d’identifier les évolutions dans la répression antidopage.

Depuis dix ans, le MPCC dresse à travers les Chiffres de la Crédibilité un état sanitaire du sport de haut niveau, de façon à replacer le cyclisme dans un contexte plus général. Ces relevés nous alertent sur les cas révélés débouchant sur des suspensions provisoires dans l’attente de procédures disciplinaires parfois longues. Ils mettent en exergue les effets de la lutte antidopage à travers le monde et les moyens mis en oeuvre par chaque sport pour y parvenir : de la mise en place d’un code mondial antidopage à l’établissement de barèmes dissuasifs de sanctions en passant par les conformations réglementaires de chaque agence nationale antidopage. Engagé et acteur de la lutte antidopage dans notre sport, le Mouvement pour un cyclisme crédible va s’atteler désormais à établir annuellement une photographie des sportives et sportifs sanctionnés dans notre sport, à l’issue des procédures afin de mieux comprendre l’évolution dans le temps des résultats de la lutte antidopage.

Au 1er septembre 2024, 75 licencié(e)s professionnel(le)s sont suspendu(e)s pour une violation des règles antidopage alors qu’ils, ou elles, évoluaient dans l’un des trois niveaux professionnels et semi-professionnels (World Tour, Pro Series, Continental) ou en ayant participé à des courses de l’un des calendriers continentaux de l’UCI au moment de leur contrôle. Ces suspensions sont présentes dans pratiquement toutes les disciplines cyclistes : route, piste, cyclo-cross, BMX et VTT. Neuf cas concernent des suspensions à vie de toute compétition sportive.

Ce chiffre de 75 coureurs et coureuses recoupe ainsi la tendance récente du nombre de cas de dopage relevés dans les Chiffres de la Crédibilité puisque 15 à 20 cas sont révélés chaque année. La durée de suspension moyenne, hors bannissement à vie, parmi les athlètes encore suspendus à ce jour est de 54 mois, soit 4 ans et demi. Ce niveau de sanction équivaut peu ou prou au barème prévu de 4 ans pour un contrôle positif à un produit interdit par l’Agence mondial antidopage (AMA).


En plus des participants aux courses, sept dirigeants d’équipe et membres de personnel médical purgent de très lourdes suspensions, voire sont bannis à vie de toute activité liée au cyclisme.

Des territoires plus touchés que d’autres par le dopage

Sur ces 75 coureurs suspendus, la Colombie (16), le Portugal (15) et l’Italie (8) sont les trois nations les plus représentées et pour différentes raisons. La Colombie semble le cas le plus complexe car nombre de coureurs contrôlés positifs étaient des coureurs semi-professionnels participant à des courses du calendrier continental américain, courses soumises soit à des contrôles des agences nationales ou à ceux de l’UCI.

La présence du Portugal dans cette hiérarchie est également la conséquence des effets de l’opération « Prova Limpa » menée par la police judiciaire locale dès 2021, sur la base d’une dénonciation anonyme. L’Agence nationale antidopage (ADoP) a très rapidement sanctionné pas moins de 11 coureurs après la perquisition des chambres de l’équipe Continental W52-FC Porto lors d’une course de niveau national, en avril 2022. La plus lourde suspension prononcée était de 10 ans. Pour sa part, le volet judiciaire a abouti à la comparution de 26 accusés et les ramifications de cette affaire ne semblent pas encore totalement éclaircies, certains témoins ayant apporté de nouveaux éléments devant la cour, il y a encore quelques semaines. Mais ce scandale a permis un pas en avant : la signature d’un protocole d’accord entre la Fédération portugaise (FPC) et l’Autorité nationale antidopage pour l’élargissement dans le pays, à la troisième division, du passeport biologique obligatoire pour les coureurs professionnels des deux premières divisions.

Enfin, la position de l’Italie mérite une attention toute particulière. Marquée par la présence de trois athlètes suspendus à vie mais courant essentiellement à une époque et dans un climat qui avait mené à la création du MPCC, elle possède cinq autres coureurs qui évoluaient tous au niveau Continental au moment de leur contrôle positif. C’est surtout l’état de ses circuits amateurs qui interroge puisque, selon la Fédération italienne (FCI), ce sont plus de 700 personnes (athlètes amateurs et professionnels, responsables de clubs) qui purgent des suspensions : du granfondo aux épreuves UCI professionnelles en passant par des courses sur route locales.

Des engagements à prendre pour l’échelon Continental

Comme le MPCC le redoutait, près de 50% des suspensions ont été prononcées pour des coureurs et coureuses qui évoluaient à l’échelon Continental au moment de leur contrôle. Il est important de rappeler que les cyclistes évoluant dans cette troisième division mondiale ne sont pas soumis à l’établissement d’un passeport biologique, l’une des clés de voûte de la lutte antidopage, dont la méthode indirecte permet notamment de mieux cibler les contrôles.

Sur ce point, notre mouvement rappelle l’engagement des équipes de niveau Pro Series, quasiment toutes membres du MPCC et soumises aux règles de ce suivi longitudinal. Même si des réticences demeurent à l’échelon inférieur, nous tenons aussi à remercier les 31 équipes continentales (féminines et masculines) qui nous ont rejoints, s’engageant ainsi à être actrices de la lutte antidopage. Nous encourageons également les autres formations, guidées par un esprit de responsabilité et de probité envers le cyclisme professionnel, dans son ensemble, mais aussi leurs coureurs, leur personnel, qu’il soit administratif ou sportif, à aussi apporter leur écot.

Dans un climat de suspicion latent, notre mouvement n’a cessé de mettre en garde sur les problèmes de dopage, et ce en dépit du long chemin effectué depuis plusieurs années, sur le plan scientifique, juridique et institutionnel.

 Surreprésentation de l’EPO

Nous ne pouvions conclure ce panorama sans évoquer les différents produits qui ont amené à la suspension de tous ces coureurs. Malgré le séisme provoqué par l’affaire Festina en 1998, symbolisant le recours massif à l’EPO, le MPCC ne peut que regretter de voir cette hormone synthétisée être la première substance incriminée, dans un quart des sanctions prononcées. Sa version évoluée, l’EPO-Cera, a notamment été détectée dans 5 cas de suspension, provenant du continent sud-américain.

13% des coureurs suspendus ont eu recours à des stéroïdes, d’autres à des corticoïdes, dont l’interdiction a été l’un des chevaux de bataille du MPCC. Précisons toutefois que dans bien des cas, la substance détectée n’a pas été rendue publique.

Cette photographie instantanée apporte donc un regard nouveau et des perspectives différentes sur la réalité de la lutte antidopage dans le cyclisme. Elle montre à quel point cet engagement de tous les instants pour un sport propre n’est pas aisé, encore moins gagné. Elle conforte le MPCC dans ses actions auprès des instances dirigeantes, des équipes, des sponsors, des organisateurs de courses, et dans son discours, ouvert à la discussion avec toutes les parties prenantes mais déterminé à préserver un cyclisme crédible. Par cette publication, le MPCC insiste pour que « la lumière reste allumée ».

Engagez-vous au MPCC ! Soyez acteurs de la lutte antidopage !